La cinétique d’O2 : l’indispensable entrainement de la consommation maximale d’Oxygène
La cinétique d’O2 : l’indispensable entrainement de la consommation maximale d’Oxygène
VMA ou VO2 ?
Aborder la notion de travail par intervalles c’est évidemment s’interroger sur la durée de ceux-ci, les temps de récupération. et cela en fonction des filières énergétiques visées.
Une question est souvent posée : sur quel indicateur va-t-on déterminer le niveau d’intensité ?
Prend-on un % de FC ou un % de VITESSE ?
La modélisation basée sur la VMA
Le principe de base est celui de calibrée les intervalles sur un certain % de VMA.
La limite de ce choix est la notion même de vitesse. En effet maintenir une certaine vitesse est nécessairement limitatif dans la durée.
Sur ce type de modélisation on sera plutôt sur recherche de vitesse très élevé rapidement qui va fortement induire une importante dérive lactique (montée des lactates) avec des temps de récupération dont le but sera de faire descendre rapidement la FC.
À la fin de chaque frac la VMA est maximale.
Ce type de modélisation implique une dérive lactique importante.
Effectuer les fractionnés très vite et assez proche de son max va certes apporter beaucoup d’oxygène au niveau des muscles mais il y aura aussi beaucoup de consommation musculaire ce qui conduira à une forte production de lactate (dérive lactique).
Du coup on va arriver à un déséquilibre à savoir que l’on va produire plus de lactate que l’on va amène d’oxygène aux muscles.
Ce type de modélisation garde bien évidemment tout son intérêt lorsque l’on veut travailler la résistance à la fatigue provoquée par charge lactique.
De plus corps ce type de travail sous charge lactique pourra progressivement apprendre à l’organisme d’être plus efficace pour utiliser le lactate comme source de carburant.
Par ailleurs étant sur des vitesse très élevées, on est sur une amplitude de foulées qui est maximale on travaille donc aussi fortement la puissance.
La modélisation basée sur la consommation d’oxygène (VO2)
Moins connu cette autre méthode est déjà ancienne, elle a été reprise dans les années 2000 et remise au goût du jour et affiné par JP MONCIAUX et BILLAT.
Elle consiste à atteindre le maximum de consommation d’oxygène et à y rester le plus longtemps possible. La modélisation ne fait donc pas intervenir directement et prioritairement la VMA.
Le but du jeu est de provoquer une dérive lente de la capacité respiratoire puis de rester un long moment (15′ minimum) sur un temps de soutien.
Certes BILLAT et JP MONCIAUX n’ont pas ré-inventé la poudre mise au point pour les entraineurs russes de la grande époque ou l’ex cycliste professionnel GIMENEZ qui a donné le nom à sa modélisation de séance.
Toutefois avec leurs grandes compétences en physiologie associé à des études sur le terrain, ils nous permettent de comprendre pourquoi la modélisation est efficace !
Le principe général est le suivant :
Au fil des fractionnés on va travailler la montée progressive de la FC max pour l’amener vers un plateau.
Autre point essentiel : on va aussi maîtriser sa vitesse sur les courtes phase de récupération.
En permanence la vitesse est donc maîtrisée :
- Sur la phase de travail.
- Mais aussi et peut-être surtout l’intensité est maîtrisée sur la phase de récupération !
Petit rappel
Le Volume d’O2 musculaire dépend du transport d’O2 aux muscles actifs et de l’utilisation d’O2 par ces muscles.
La performance d’un athlète est-elle systématiquement dépendante de la vitesse d’augmentation de VO2 ?
On serait tenté de le penser mais voilà en ultra longue distance les choses sont un peu différentes.
En effet on a montré que précisément la performance du haut niveau sur un ultra est liée pour partie aux facteurs aérobies marquée par une faible lactatémie maximale et une faible FCmax, à l’issu d’un test d’effort maximal.
Source
Hawley JA : Adaptations of skeletal muscle to prolonged, intense endurance training”
Édition : Clinical and experimental pharmacology and physiology, 2001.
Cela s’explique par une optimisation de l’entraînement qui entraîne une adaptation du volume d’éjection systolique, ce qui justifie une FC moins importante.
Quant à la lactatémie qui reste classiquement le marqueur de l’implication anaérobie lactique les valeurs inférieures observées régulièrement chez les Elites montre au final qu’ils ont une moins bonne adaptation que les coureurs lambda sur le plan de l’anaérobie lactique.
Cela n’a rien de franchement surprenant. car pour un Elite d’un sport d’endurance l’entraînement mis en place entraîne une hyper adaptation des facteurs aérobies. et par voie de conséquence une sollicitation amoindrie des facteurs anaérobie lactiques.
D’ailleurs cela s’observe sur les courbes de cinétique de VO2 des tests d’efforts.
Plus le compétiteur est de haut niveau en terme d’efficience de performance d’ endurance plus la fameuse rupture de linéarité de cinétique d’O2 est tardive.
Iaiche puis Lucia (qui a fait des recherches sur des cyclistes pro) expliquent bien cela en nous montrant que cela est en lien à une consommation d’oxygène moindre pour un même effort.
Ses travaux montrent aussi un ralentissement de la cinétique d’O2 pour ces athlètes de haut niveau.
Ce qui présente un intérêt pour eux : celui d’être performant sans forcément exploser les compteurs en terme de niveaux de consommation d’oxygène maximale.
En réalité plus la rupture de linéarité de cinétique d’O2 est tardive plus l’adaptation à l’anaérobie lactique sera elle aussi tardive.
L’explication est directement à la nature des fibres mobilisés et à la cinétique d’O2.
La quantité et l’intensité de l’entraînement spécifique à un compétiteur typé sport d’endurance fera intervenir les fibres de type II plus tardivement.
L’objectif est d’agir sur la cinétique d’O2 avant la mise en route du travail anaérobie lactique montrant le bout de son nez au dessus du fameux seuil 2.
Du coup ces fibres II moins mobilisés que chez le coureur lambda seront davantage recrutées quand l’intensité augmentera.
A l’inverse moins le coureur sera aguerri plus vite il se positionnera sur la zone anaérobie lactique et donc plus souvent il mobilisera ses fibres II.
Et lorsqu’il souhaitera augmenter d’intensité cela deviendra impossible puisque les ressources utiles pour cela seront déjà épuisées.
Tout cela est développé par Green et Londeree.
Sources
GREEN : “Adaptation in skeletal muscle exercise metabolism to a sustained session of heavy intermittent exercise”
Édition : J Physiol Endocrinol Metab, 2000.
Londeree : “Oxygen consumption of cycle ergometry is nonliner related to work rate and pedal rate”
Édition : Med Sci Sport, 1997.
Iaiche R : “Evaluation de VO2max et de VMA, en laboratoire et sur le terrain”
Édition Sciences et Sport, 1996.
Lucia A : “Referred pedalling cadence in professional cycling”
Édition : Med sci sports, 2001.
Je vous place ici deux test d’effort significatif sur le niveau de potentiel :
Valeurs d’un vététiste dont le test révèle un niveau “faible” en terme de performance physio intrinsèque.
- Une faible puissance maxi.
- Une cinétique de VO2 “lente” avec les deux lignes VO2 et VCO2 encore très proche après le seuil 1.
D’autre part un test d’un athlète de haut niveau sur son test de fin de préparation estivale après un important travail autour du développement de la consommation d’oxygène avec des séances en variations d’allure.
Et celle d’un athlète de haut niveau.
Deux pistes complémentaires
Première piste : les intervalles courts répétés longtemps dans la durée
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Comment s’y prend-on ?
On se place en progressivité avec une intensité bien en dessous du maxi possible dans les premiers fracs.
Le but de la manip est de gérer sa vitesse pour laisser progressivement au fil des fractionnés monte la FC (cela peut prendre 4 à 7 minutes de 30/30).
Et on place entre chaque frac (de 30” à 1′ voir 1’30”) des récupérations qui se feront en maîtrisant la vitesse pour rester sur un FC assez haute (70% de FC) et surtout reprendre un indispensable relâchement qui favorisera une bonne oxygénation (le relâchement étant moins consommateur d’oxygène).
La notion de relâchement est fondamentale c’est elle qui va pouvoir permettre une optimisation de la montée progressive de la FC.
Ce relâchement ne signifiera pas une foulée raccourcie, on contraire, on va rechercher une dynamique de foulée par l’amplitude des foulées. Cette amplitude sera essentiel sur un ultra ou spontanément avec la fatigue les foulées au fil des heures se réduisent, si je devais employer une expression imaginaire tout se passe comme si le muscle se recroquevillait sur lui même pour se protéger. limitant de fait l’efficacité motrice.
Hors dès l’instant où l’on augmente la FC on devient alors très consommateur d’oxygène.
Et plus on consomme d’oxygène plus les muscles sont oxygénés.
Exemples de modélisation, en fonction du niveau d’expertise :
- 3 x (12′ de 30/30) (récup très courte, relâchée entre les blocs et sur une FC de 70%)
- 2 x (15′ de 40/20)
- 3 x (10 x 1’/45”)
Ou encore deux modélisations extrêmement utilisés par les cyclistes de haut niveau :
Le célébrissime “Gimenez” et son frère le “casse”
À chaque fois avec la même problématique.
Celle de maîtriser la vitesse des fracs pour maîtriser la dérive lactique.
Encore une fois Il ne faut pas chercher à très vite “titiller” la FC max, l’important est de monter progressivement sur sa VMA et sa FC max.
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Un plateau à tenir longtemps dans la durée.
Autre point il est important que la FC arrive progressivement sur un plateau (mini 90% – 95% de Fc).
Lorsque celui-ci sera atteint on va le tenir (15 minutes est un minimum ; pour les Elites on peut le faire tenir 30 minutes).
Attention il est important de se donner le temps pour atteindre cette intensité, si on monte trop vite on ne maîtrisera pas la dérive lactique et celle-ci bloquera le muscle qui ne pourra pas tenir longtemps dans le temps.
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Pourquoi cette durée minimum de 15 minutes ?
En dessous l’accélération sera trop forte et on va enclencher une forte dérive lactique.
Pour arriver à un des principaux objectif de la séance il faut monter au dessus de 90% de Fc max et cumuler ensuite à minima 15 minutes.
Donc sur les derniers fractionnés on restera sur une forme de plateau de FC élevé (très proche de la FCmax) et derrière chaque phase de récupération sera réaliser sur une course maîtrisée en relâchement.
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Quel terrain ?
Attention à l’objectif visée !
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Sur forte côte :
On va travailler la dynamique du passage du pied sous la hanche, la dominante est un travail musculaire en puissance (à l’identique de ce qui se fera sur du travail sur escaliers par exemple).
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Sur du plat :
C’est là que l’on va travailler l’aspect “relâchement optimisation de l’apport en oxygène” !
C’est sur ce type de séance que l’on repoussera le seuil de fatigue liée au manque d’oxygénation ; en effet c’est sur ce type de travail que l’on va apporter le maxi d’oxygène au muscle.
Travail tout à fait intéressant puisque plus un muscle va recevoir un apport en oxygène plus il sera résistant dans le temps.
Et là encore ce phénomène est étroitement lié au relâchement.
Permettre de travailler longtemps dans le temps est l’enjeu majeur de ce type de séance.
En effet contrairement à une séance construite sur la VMA où l’on va nécessairement se retrouver avec la barrière de la vitesse qui est forcément limitative dans le temps, quand on est sur travail ciblée sur la consommation d’Oxygène on pourra plus facilement travailler longtemps dans le temps puisque l’on va maîtriser sa vitesse sans chercher à la monter à très forte intensité. On va optimiser la consommation d’O2 tout en maîtrisant la vitesse.
Le but c’est d’amener un maximum d’oxygène aux muscles tout en maîtrisant la dérive lactique.
Seconde piste : autour du seuil de l’allure course : le yoyo “dessus/dessous”
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Cette séance vise essentiellement la capacité à encaisser les accélérations et les variations d’allure.
Eh oui même les tous meilleurs mondiaux ne font pas un semi, un marathon et à forciori un trail sur un tempo de métronome.
Le but du jeu est d’augmenter les capacités d’oxygénation à l’allure course.
Pour cela on va s’habiter à courir au dessus de cette allure pour apprendre à l’organisme à maîtriser la dérive de la FC vers le haut. hors plus la dérive de Fc sera faible plus la dérive lactique le sera aussi.
Et parallèlement à cela on va travailler aussi sur les phases de récupération contrôlée le relâchement de la foulée ou de la glisse pour un skieur.
Voilà pourquoi on peut dire que cette modélisation de séance va renforcer l’économie de consommation d’oxygène dans le temps.
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Comment s’y prend-on ?
Séance préalable :
- Cas n°1 : le coureur est expérimenté, il connaît sa vitesse moyenne ascensionnelle sur un longue bosse (pour un traileur ou skieur alpiniste par exemple) ou s’il est marathonien il connaît son allure marathon, si c’est sur un entraînement en vélo avec un capteur le juge de paix sera la puissance en watt.
- Cas n°2 : le coureur est quelque peu nive et il lui faudra mettre en place une séance pour déterminer sa VMA (ou passage d’un test d’effort clinique).
Lorsque la donnée est connue on procède ainsi pour structurer la séance :
- Un 20′ échauffement en progressivité qui va conduite sur l’allure course (avec l’habitude et la confiance en ses ressentis en un minimum de pratique on peut très facilement se caler dessus.)
- Lorsque l’allure course est atteinte on va alors jouer au “yoyo” autour de cette allure.
En structurant ainsi la séance :
3′ légèrement au dessus de l’allure (on va très schématiquement avec un repère de Fc de 90%-92% de Fc max)
Suivi par 3′ légèrement en dessous (on baissera de 2-3% de la Fc identifiée à l’allure course, si elle est à 88% on passera à 85%)
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Et ainsi de suite sur 30 à 45′
Une séance de référence pour connaître ses progrès et son niveau de forme.
Vous l’avez compris sur ce type de séance l’objectif visé est de pouvoir monter un peu au dessus de son allure course sans forcément exploser le compteur de la FC !
Donc plus on avancera vers son pic de forme plus la dérive de la FC sera faible.
En début de reprise du travail foncier il sera sans doute difficile de limiter cette dérive qui va progressivement monter mais l’entraînement de ce type de séance permettra de limiter la dérive de FC malgré une augmentation du nombre de yo-yo (un peu au dessus de la vitesse de course/un peu en dessous).
Contrairement aux séances à forte charge musculaire comme celles de l’endurance de force ce type de séance peut se faire jusqu’à l’entrée dans le cycle d’affûtage avant l’objectif visé.
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